Bonne nouvelle ! Céline fait encore
vendre ! Sinon comment justifier la couverture accrocheuse de La Revue des
deux mondes de mai 2017 après avoir lu les deux misérables articles qui sont
consacrés à l’écrivain génial que l’on aime haïr.
La une accrocheuse de La Revue des deux mondes de mai 2017 |
Dans son édito, Valérie Toranian tente de
raccrocher la polémique provoquée par le pavé targuievien — somme toute très
superficielle car il y aura toujours un fossé entre les amoureux de littérature
et les idéologues de la bien-pensance —, de raccrocher la « polémique »
donc, au thème de la revue, « Comment
aborder l’écrivain face au pouvoir » écrit-elle « sans revenir encore
et toujours à Céline. » La question est curieuse quand il s’agit de Céline.
À quel pouvoir a-t-il été confronté ? De même, il est difficile d’écrire sans
sourire qu’il a souffert de la censure (du moins de son vivant). Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre
mondiale, son antisémitisme viscéral était partagé par un large lectorat qui
faisait de ses pamphlets des succès commerciaux dont son éditeur a largement
profité. Ses grands romans de l’après-guerre (que beaucoup considèrent comme
ses meilleurs) ont assez facilement trouvé une place qu’ils n’ont plus quittée
parmi les classiques du XXe siècle.
Les deux articles consacrés à la polémique
sont très brouillons, écrits avec les pieds, sans doute trop vite. Ils ont été
choisis pour prendre position entre des avis pas si opposés que cela et laisser
à la revue le beau rôle de l’objectivité. Par chance, il n’a pas été fait appel
à ce gugusse de Charles Dantzig (membre du comité de rédaction) pour intervenir
dans le débat. Vous savez, Dantzig, ce producteur de France Culture qui ne
manque pas, pour essayer de se faire un nom, une occasion de dire ou d’écrire
que Céline n’est même pas un bon écrivain (comme si dans le cas contraire, cela
aurait justifier son antisémitisme !).
Pour résumer les deux articles qui nous
concernent, le mieux est de redonner la main à La directrice de la rédaction.
« Pour Stéphane Guéguan (conservateur au
musée d’Orsay, Faut-il brûler Céline ?) aucune preuve irréfutable n’est apportée
à la thèse du propagandiste stipendié et de la taupe nazie, et encore moins à
l’hypothèse qu’il ait appris, dès 1942, et approuvé la solution finale. […]
Cette sempiternelle chasse aux sorcières empêche d’admettre la part
d’autonomie, de liberté imprescriptible, de la création artistique.
Pour Sébastien Lapaque (journaliste et
écrivain, Avertissement aux célinomanes), en revanche, l’auteur de Bagatelles
pour un massacre et de L’Ecole des cadavres, […] ne fut ni un pétainiste, ni un
fasciste. Il fut pire que cela : un raciste hygiéniste et eugéniste
pro-nazi. D’où son mépris pour la collaboration parisienne, qu’il suspectait de
boy-scoutisme et de masturbation idéologique. »
Bien sûr, il y a aussi dans ce numéro de La
Revue des deux mondes, un petit inédit de Céline (Le Secret d’Etat), une
curiosité présentée par André Derval. C’est en fait une lettre de Norvège
adressée à Roland Petit pour lui proposer un argument de ballet.
Tout cela était donc bien léger pour justifier
la belle photo de « une » et mon achat.
Heureusement, poursuivant ma lecture, je suis
tombé sur un article de Marion Dapsance intitulé Une éthique à géométrie
variable, sous-titré L’étrange silence des bouddhistes français dans le débat
sur l’avortement. Mais cela nous éloigne de notre sujet…
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