mercredi 21 novembre 2018

Avez-vous (vraiment) lu Céline ? Marc Laudelout à propos du livre de David Alliot et Éric Mazet

Avez-vous (vraiment) lu Céline ?

PAR MARC LAUDELOUT (éditorial paru dans Le Bulletin célinien 



Contre Céline tout est désormais permis. Dans un fort volume d’un millier de pages (Céline, la race, le Juif, de Pierre-André Taguieff et Annick Duraffour, n.d.l.r.), on peut, sans susciter guère de contestations, le faire passer pour un vil délateur et un actif agent de l’Allemagne alors même qu’on n’apporte aucune preuve tangible. Tout ou presque n’y est que suppositions gratuites, insinuations malveillantes, déductions fallacieuses et hypothèses bancales. Le piège est redoutable car réfuter ces calomnies vous fait ipso facto passer pour un personnage suspect. Céline, il est vrai, n’est pas un écrivain facile à défendre tant il s’est mis lui-même dans un mauvais cas. Il ne s’agit d’ailleurs pas de le défendre (son procès se tint il y a plus d’un demi-siècle) mais d’établir les faits, uniquement les faits.
On aurait envie de répondre à ses détracteurs que ce n’est pas la peine d’en rajouter même si l’envie démange certains de le mettre indéfiniment en accusation. Ils n’ont de cesse de faire encore et toujours son procès. L’année du cinquantenaire de sa mort, la chaîne franco-allemande Arte, puis la Télévision suisse romande, ont précisément diffusé un documentaire refaisant Le Procès de Céline, où intervenait déjà le tandem Taguieff-Duraffour. Aujourd’hui, la revue L’Histoire publie un dossier sur le même sujet (« Céline, le procès d’un antisémite », n° 453, novembre 2018) et, au début de ce mois, le tribunal de la FFDE (Fédération Française de Débat et d’Éloquence) organise au Palais de Justice de Paris un nouveau “procès Céline” !

C’est dire si Avez-vous lu Céline ? (128 pages, 15 euros, Pierre-Guillaume de Roux ) de David Alliot et Éric Mazet vient à point nommé pour remettre les pendules à l’heure. Le lecteur y verra que ni le docteur Joseph Hogarth (Bezons) ni le docteur Herminée Howyan (Clichy) ne furent victimes des propos de leur confrère Destouches. 

Et, comme l’a admis l’Association des Amis de Robert Desnos, Céline n’est strictement pour rien dans le sort tragique du poète. Les auteurs démontent aussi l’assertion venimeuse selon laquelle Helmut Knochen aurait désigné Céline comme agent du SD. C’est de la même farine que la mention de son nom sur une note d’Otto Abetz le pressentant pour diriger le Commissariat général aux questions juives. Le premier biographe de Céline évoquait déjà un « document sans aucune valeur de preuve » (Gibault III, p. 257).
Tout le problème réside là, en effet : n’ayant ni l’un ni l’autre de formation historique, Taguieff et Duraffour ne procèdent à aucune critique interne et externe des documents qu’ils exhument. À partir de là, c’est la porte ouverte à toutes les allégations, surtout si elles vont dans leur sens. 
Le plus grotesque dans la démarche de Taguieff est sans doute ailleurs : dénier à Céline toute réelle valeur littéraire.
« Son pavé est conçu comme une entreprise de démolition de l’écrivain. L’intention est bien d’écarter de Céline tout lecteur, tout directeur de thèse, tout acteur, comme autrefois les catholiques jetaient l’opprobre sur Voltaire, les républicains sur Chateaubriand, les féministes sur Sade et les sacristains sur Baudelaire. »
Gageons que la grande presse ne parlera guère de cet opuscule incisif et pugnace. Ce serait mettre en question les articles convenus qui rendirent compte du bouquin de Taguieff. Les céliniens, eux, savent ce qu’il leur reste à faire : lire et faire connaître autour d’eux cet ouvrage qui y répond de si magistrale façon.

1 commentaire:

  1. « Vous le savez sans doute, j'ai jeté mon humble dévolu sur le poste de médecin du dispensaire de Bezons (Seine-et-Oise) actuellement occupé par un nègre haïtien et sa femme. Ce nègre étranger doit normalement être renvoyé à Haïti - d'après les lois nouvelles en vigueur." "« Le poste de médecin du Dispensaire Municipal de Bezons (Seine-et-Oise) est actuellement occupé par un médecin étranger juif (9) non naturalisé. En vertu des récents décrets, ce médecin doit être licencié. » Céline écrivant au dr Branqui, Directeur des services de Santé de Bezons! Grand écrivain si mais surtout un salaud

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