samedi 19 octobre 2019

Ole Seyffart Sørensen, témoin du séjour au Danemark et de la rencontre de Céline avec Milton Hindus

C’est en parcourant La Masure de sable de Frédéric Andreu, sous-titré Sur les traces de Louis-Ferdinand Céline au Danemark, que j’ai croisé Ole Seyffart Sørensen… Le nom me rappelait quelqu’un, ce qu’une recherche rapide me confirma en allant sur Arkiv.dk. Ce professeur d’école primaire avait écrit un livre sur la rencontre de Céline avec Milton Hindus intitulé Giganten, professoren og drengen (Le géant, le professeur et le garçon). Mais, bien entendu Le Bulletin célinien en avait largement parlé dans son n°360 de février 2014… (voir ci-après)

Sur la page des Archives danoises consacrée au Professeur d’école primaire, le recteur professionnel Ole Seyffart Sørensen…
2.6 2013 Foromtale f bogen om Céline og Korsør, "Et stormfuld møde", Korsør Pisten 24. juli 2013
2.7 2013 Anmeldelse af bogen "Giganten, professoren og drengen", Sjællandske, 10. august 2013
2.8 2014 Omtale af udenlandsk interesse for bogen om Céline og Korsør, Sjællandske, 22. november 2014
2.9 2014 Omtale af udenlandsk interesse for bogen om Céline og Korsør, Korsør Posten, 30. december 2014
baggesenbytur
3.10 2013 "Giganten, professoren og drengen", en lokalhistorisk beretning om den franske forfatter Louis-Ferdinand Célines eksil i Korsør fra 1948 til 1951




TRADUCTION :
2.5 2009 "Au revoir à Folkeskolen". 
Commentaire sur le Folkeskole. Berlingsske Tidende, le 27 juillet 2009. 
117/2010
2.6 2013 Avant-propos du livre sur Céline et Korsør, "A Stormy Meeting", Korsør Piste du 24 juillet 2013
2.7 Revue 2013 du livre "Le géant, le professeur et le garçon", Zélande, le 10 août 2013
2.8 2014 Examen de l’intérêt des étrangers pour le livre sur Céline et Korsør, Zélande, 22 novembre 2014
2.9 2014 Examen de l’intérêt des étrangers pour le livre sur Céline et Korsør, Korsør Posten, 30 décembre 2014
baggesenbytur
3.10 2013 "Le géant, le professeur et le garçon", récit historique local de l’exil de l’auteur français Louis-Ferdinand Céline à Korsør de 1948 à 1951
3.11 2017 "Littérature d’histoire locale sur les personnages, la topographie et les événements de Korsør et ses environs, 2006-2016" - Publié par Ole Seyffart Sørensen, janvier 2017.

Il est en particulier l’auteur de Giganten, professoren og drengen (Le géant, le professeur et le garçon) sur sa rencontre de Céline à Korsor. Livre référencé à la bibliothèque de Korsor sous :
Giganten, professoren og drengen.
En lokalhistorisk fortælling om Louis-Ferdinand Céline.
128 sider + omslag
Ole Seyffart Sørensen

Privattryk



Mais, bien entendu Le Bulletin célinien en avait déjà largement parlé dans son n° 360 de février 2014


Le géant, le professeur et l’enfant

Après une brillante carrière internationale d’enseignant et de codirecteur d’Écoles Européennes (professeur à l’École Européenne de Bruxelles, puis codirecteur d’établissements analogues à Culham, Angleterre, et à Luxembourg), Ole Seyffart Sørensen (né en 1940) a regagné sa ville natale, Korsør, au Danemark, pour y couler une retraite bien méritée. Mais comment cet homme infatigable se serait-il satisfait de cultiver son jardin alors que ses talents d’organisateur, d’éditeur, de chercheur, d’écrivain, d’archiviste, et j’en passe, se manifestent dans plusieurs domaines ?

Ayant, enfant, rencontré Céline du temps où le proscrit se morfondait à Klarskovgaard, la propriété de son avocat, Thorvald Mikkelsen, à quelques kilomètres de Korsør, cela faisait des années que Ole Seyffart Sørensen approfondissait ses connaissances de l’œuvre du Français tout en suivant de près l’actualité célinienne. Voilà bientôt trois ans qu’il s’est lancé dans des recherches minutieuses pour mieux mettre en lumière les tenants et les aboutissants de la rencontre entre Céline et Milton Hindus, le professeur américain venu lui rendre visite, après une longue correspondance, sur les lieux mêmes de l’exil campagnard en juillet-août 1948. L’heureux résultat de cet absorbant travail est un livre, écrit en danois mais comportant un sommaire en français et un en anglais, qui vient judicieusement compléter l’ouvrage de Jean-Paul Louis sur le même sujet. Sur le plan local, Le Géant, le Professeur et l’Enfant sera désormais une référence. D’ailleurs, il dépasse largement ce simple cadre.
En plus de ses souvenirs de jeunesse, qu’il évoque avec émotion, Ole Seyffart Sørensen s’appuie sur des documents déjà connus, mais également sur d’autres, inédits, notamment sur sa correspondance avec Myra, la fille de Milton Hindus.
Enrichi d’une iconographie de bon aloi, Le Géant, le Professeur et l’Enfant non seulement rend justice aux deux protagonistes, mais nous peint un attachant tableau d’époque de ce qu’était Korsør en 1948, une ville débordante d’animation grâce à ses échoppes et ses magasins de proximité, son port de commerce, ses multiples compagnies de navigation et ses entreprises industrielles.
Or, depuis la constuction du gigantesque pont qui relie le Seeland et la Fionie, on ne voit plus le moindre ferry à Korsør. La gare ferroviaire a été déplacée en pleine campagne, les magasins d’alimentation ont fait place à des supermarchés, le chômage a frappé durement, bref, la cité a du mal à se survivre malgré une activité culturelle soutenue, qui doit beaucoup à des édiles intelligents et à des personnalités locales dévouées - comme Ole Seyffart Sørensen.
Dans son livre, l’auteur nous prend par la main et nous fait suivre Céline, sa femme Lucette et Milton Hindus, pour parcourir avec eux le vieux quartier de Korsør, Céline s’attendrissant au passage sur des enfants auxquels il sourit, pour finalement aller déguster une glace à la terrasse du café-restaurant de la plage.
Apparemment, ces incursions en ville et au bord de l’eau sont empreintes de quiétude, même de chaude sympathie. Mais ce spectacle est trompeur, il cache une tout autre réalité. Car que fut cette rencontre tant espérée par les deux hommes sinon la cause d’une amère déception? L’un attendait trop de l’autre, et leurs caractères étaient trop incompatibles, ce que le temps ne fit que confirmer.
À l’instar de Pascal Ifri, Ole Seyffart Sørensen apporte un correctif à la vision qu’ont généralement les célinistes de Milton Hindus. Non, le jeune professeur américain n’était pas si naïf ni si maladroit qu’on a bien voulu le prétendre. Derrière sa candeur, il a, nous dit Ole Seyffart Sørensen, bien percé la vraie nature, complexe certes, de Céline. Quant à celui-ci, avec son caractère en cor de chasse, ses constantes sautes d’humeur, on ne peut pas dire qu’il ait bien accueilli son visiteur, le reléguant, à son arrivée, dans le pire hôtel de la ville - indéniablement pour le maintenir à distance, alors que, sur simple demande, il aurait pu le faire loger dans une des maisons rouges du domaine Mikkelsen.
Peut-être avait-il eu raison puisque la mésentente entre les deux hommes ne fit que s’accroître au fil des jours. Déception de part et d’autre, donc, ce qui, étonnamment, n’a pas empêché, après le départ de Hindus, une correspondance amicale de se poursuivre quelque temps, jusqu’au jour où le professeur américain publiait un livre qui portait un jugement impitoyable sur Céline, qu’il se mettait ainsi définitivement à dos. La suite est bien connue : fureur vengeresse de Céline, menace de procès, etc.
Ole Seyffart Sørensen a lui-même assuré l’édition de son livre, qui compte 127 pages et a une cinquantaine d’illustrations, dont plusieurs inconnues jusqu’à ce jour. Plaisante couverture, une vue panoramique en couleur due à l’auteur, montrant Fanehuset et ses alentours, prairie, forêt, côte et mer. Pour faire bon compte, une typographie aérée en caractères très lisibles sur papier de luxe.
Mais ce qu’on retiendra avant tout, c’est un exceptionnel talent de conteur, qui allie le sérieux du chercheur au style riche et précis de l’écrivain. Voilà qui comblera le lecteur sachant le danois, qu’il soit célinien ou pas. Céline, Milton Hindus et Korsør retrouvent vie sous la plume de Ole Seyffart Sørensen. Ils ont bien de la chance de le devoir à un Danois de cette trempe.
François MARCHETTI
• Ole Seylfart Sarensen, Giganten, Professoren - og Drengen, Privattryk, 2013, 127 pages.

Céline en saint François d’Assise

© Extrait de Ole Seyffart SIHensen, Giganten, professoren - og drengen [Le géant, le professeur - et l’enfant], Chez l’auteur, 2013, pp. 56-57. Traduction: François Marchetti (qui a donné le titre à cet extrait).

Première rencontre
Le jeune garçon sortit sa bicyclette du sous-sol. Il aimait la bicyclette que son père lui avait bricolée pour sa première distribution de journaux à partir de deux vieux vélos achetés chez le ferrailleur de Taar, borgvej. Le résultat était utilisable bien que les roues aient été de tailles différentes, mais l'engin avait déjà plusieurs fois fait ses preuves.
C'est aujourd'hui qu'il devait accompagner son père à Fanehuset. La mère leur avait préparé un casse-croûte, et il était convenu qu'il serait à l'atelier à 9 heures pour aider à charger une plaque de cuisine, un buffet et des outils sur un triporteur que son père avait loué. L'atelier était au fond de la cour au 26 Algade. C'était un vieil immeuble. Au dessus du portail, que l'enfant trouvait énorme, il y ait une poutre sur laquelle était inscrit quelque chose qu'il ne comprenait pas mais qui était suivi de "anno 1704". Cela devait faire bien longtemps! Son père lui avait expliqué ce que veut dire « anno ". Le jeune garçon aimait bien ce mot étranger. Cela sonnait bien. Il roula derrière son père dans la forêt. Il avait proposé de suivre d'abord le chemin à travers champs qu'il connaissait bien pour l'avoir emprunté lors de ses tournées de distributeur de journaux.
Bien loin, sur la gauche du chemin, il y avait une petite maison contre laquelle était accolé un gros bateau. C’était là le dernier arrêt de sa tournée. « Non », avait dit son père, « ça n’ira pas! Nous ne pourrons pas passer avec le triporteur dans la forêt! " À part la côte juste avant l’entrée de la forêt, une fois dépassé « Skovhuset », tout alla bien, et ils arrivèrent à Klarskovgaard vers les 11 heures. Ils rangèrent leurs bicyclettes à la ferme, empruntèrent une brouette et emportèrent plaque, buffet et outils jusqu’à « Fanehuset ». Le jeune garçon prit peur en voyant un homme et un chien-loup devant la maison. Peur, non pas de l’homme, mais du chien ! Il avait été mordu par un chien quelques années plus tôt, et cette expérience avait fait que depuis il se tenait à distance des chiens. L’homme comprit qu’il avait peur. Il dit quelque chose à une femme, qui sourit et s’éloigna avec le chien. L’homme s’approcha alors de l’enfant, se pencha pour être à hauteur d’yeux. Il dit quelque chose que l’enfant ne comprit pas, et sourit. L’enfant fut rassuré, et quand l’homme mit un doigt sur ses lèvres et désigna le talus, il comprit qu’il devait rester silencieux car on voulait lui montrer quelque chose. Il oublia tout à fait son père qui travaillait et allait et venait à l’intérieur de la maison. Prudemment, il se dirigea avec l’homme vers quantité d’oiseaux - dans les arbres, sur la corde à linge et dans l’herbe ! Ils piaillaient et jasaient, mais ils ne s’envolèrent pas quand ils s’approchèrent tout près d’eux. Alors l’homme se mit à parler aux oiseaux. Ou bien chantait-il? C’était comme s’il psalmodiait, un mot que son père lui avait appris en lui parlant de François.
Quand le père eut fini, ils s’assirent au bord du talus et mangèrent leur casse-croûte avant de rentrer. Le vélo fut embarqué sur le triporteur, et l’enfant fut ravi d’être transporté tandis que son père appuyait sur les pédales. « Tu vas vu les oiseaux, papa? " demanda le jeune garçon. « C’était comme lui, François, là-bas en Italie! » Lui qui disait la messe pour les oiseaux! ", et il raconta à son père l’aventure qu’il venait de vivre.
Ole Seyffart Sørensen


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire